22 mars 2008

Chère Tiphaine

Vous m'avez adressé un commentaire pour me reprocher de crier avec les loups contre l'implantation de l'aire des gens du voyage à Pinterville. Je récuse cet amalgame et je vous en donne une explication. La municipalité de Pinterville a attaqué devant le tribunal administratif de Rouen la délibération de la ville de Louviers modifiant son plan d'occupation des sols. Elle a perdu en première instance et va faire appel du jugement. Le commissaire du gouvernement (qui représente la société) a demandé l'annulation de la délibération en se fondant sur plusieurs arguments : le commissaire-enquêteur chargé de l'enquête préalable à la modification du POS de Louviers a conclu négativement après avoir entendu les riverains et les élus. Il a ensuite mis en avant la proximité du terrain avec une autoroute très fréquentée (26 000 véhicules-jour) dont de nombreux poids lourds et posé cette question : « s'il s'était agi d'un terrain de camping ordinaire, la municipalité de Louviers aurait-elle retenu ce terrain ? » Il a affirmé que le terrain n'avait pas été dépollué dans de bonnes conditions. Enfin, il a contesté la procédure utilisée par la ville de Louviers.
Ce que vous dites est vrai : personne ne veut près de chez soi ni train, ni prison, ni voie rapide, ni aire des gens du voyage, ni centre de réinsertion, ni centre pour handicapés, ni quoi que ce soit. Personne ne veut rien qui gêne ou qu'on croit qu'il pourrait gêner. Et les élus doivent privilégier l'intérêt général contre les intérêts particuliers. A l'agglomération, les deux communes qui ont accepté d'accueillir une aire d'accueil des gens du voyage ont été Louviers et Val-de-Reuil.
A Louviers, le problème posé par le terrain est sa proximité avec Pinterville et l'exiguïté des voies d'accès ? Comment ne pas imaginer que parmi les opposants, il n'y ait pas de xénophobes ? Je ne suis pas naïf. Je connais les vilains sentiments de certains de nos compatriotes. M. Hortefeux est un brillant exégète de ces sentiments-là.
Mais je considère que le maire de Louviers, également (alors) conseiller général de Louviers-sud, devait par la négociation et non par un diktat, trouver un compromis. Si c'était impossible, il fallait renoncer et chercher un autre terrain. L'aménagement du quartier de la gare aurait pu comprendre une aire des gens du voyage puisqu'il en existe déjà une, non conforme, non digne d'accueillir des êtres humains comme vous et moi. L'option de la municipalité de Louviers est discutable puisqu'elle n'a pas été comprise ni acceptée. Un élu doit savoir reculer. François Mitterrand l'a fait avec la loi Savary, Chirac l'a fait avec le CPE. Il n'y a aucune honte à avouer que l'on s'est trompé. Qui sait si Alain Le Vern, président de la Région, ne devra pas le faire avec la ligne SNCF de la vallée de l'Iton ?
Quant à l'aire de Pinterville, elle est réalisée, elle est conforme aux textes et je pense que personne n'imagine raisonnablement qu'il faudra un jour la détruire. Il faut maintenant vivre avec. Avec du ressentiment, de l'incompréhension et le sentiment que tout n'a pas été fait pour éviter cela. Les électeurs possèdent un pouvoir énorme : celui de vous sanctionner s'ils ne sont pas contents. Cela s'appelle la démocratie. Les Pintervillais, comme les Français au plan national, l'ont dit à Franck Martin et à Nicolas Sarkozy. Pour des raisons différentes.
PS : si vous souhaitez me laisser votre adresse mail, adressez-la moi à houel2008@free.fr

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