1 juin 2010

Sarkozy n’en est pas à son coup d’essai

Insulter la mémoire d’un président de la République défunt, comme l’a fait Nicolas Sarkozy en rendant François Mitterrand responsable des difficultés actuelles des régimes de retraite, voilà ce qu’aucun président de la République en exercice n’avait encore jamais fait. Mais pour qui cherche à s’informer de la conduite de notre président, il apparaît qu’en termes d’insultes, Nicolas Sarkozy n’en est pas à son coup d’essai. Et nous ne nous étendrons pas sur le fameux « Casse-toi pov’con ! » proféré en 2008 à l’encontre d’un visiteur du salon de l’agriculture.

Le vendredi 4 mai 2007, l’avant-veille du second tour de l’élection présidentielle et pour conclure sa campagne, Nicolas Sarkozy débarque en le faisant savoir à peine quelques heures auparavant aux médias nationaux, au plateau des Glières, haut lieu de la Résistance de Haute-Savoie. Pour les authentiques résistants dont aucun n’a été prévenu, c’est là, sans possibilité d’y répondre avant la clôture de la campagne, une lamentable opération de récupération électorale.

Mais à ce moment là, seul l’entourage de Sarkozy sait réellement ce qui se cache derrière le mot de rupture dont il a fait le leitmotiv de sa campagne. Cela, les Français vont le découvrir quelques mois plus tard après son élection quand Denis Kessler, ancien vice-président du Medef et l’un des principaux inspirateurs du programme du futur président de la République, se lâche enfin. Le 4 octobre 2007, il déclare publiquement : « Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945 et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance. […] Le Gouvernement s’y emploie. »

Le déplacement de Nicolas Sarkozy au plateau des Glières où tombèrent en mars 1944 sous le feu des nazis et des miliciens français de Vichy quelques149 maquisards était donc une véritable imposture au regard du contenu du programme du Conseil national de la Résistance magnifiquement intitulé « Les jours heureux » et publié ce même mois de mars 1944, alors que la France n’était pas encore libérée. Car, comme l’écrit Jean-Luc Porquet –, journaliste et l’un des contributeurs à un remarquable ouvrage qui vient de paraître sur le sujet, à l’initiative de l’Association Citoyens Résistants d’hier et d’aujourd’hui –, « si l’on parle encore aujourd’hui de “l’exception française“, du “modèle social français“, c’est parce que notre système social français – celui des retraites et de la Sécurité sociale entre autres – est issu de ce texte fondateur. »

Mais cette énorme provocation car c’en est une, véritable insulte à la mémoire des Résistants ne s’arrête pas là. Nicolas Sarkozy est aussi l’homme qui rit dans les cimetières. L’année suivante, le 18 mars 2008, deux jours seulement après la première déculottée électorale de l’UMP aux municipales, il remet ça. Il est de nouveau sur le plateau des Glières. Nous résumons Jean-Luc Porquet. « Et là, au petit cimetière de Morette où reposent 105 maquisards, se passe une scène totalement hallucinante. Si elle n’avait pas été filmée par le cinéaste Gilles Perret qui avait subrepticement réussi à se faire admettre dans la cohorte des médias officiels, personne ne pourrait croire cela. Sarkozy, d’excellente humeur, quelques minutes à peine après la minute de silence et alors que les prises de vues officielles des télévisions et du service des Armées sont terminées, se met à parler de lui, de Carla et à plaisanter. Il commence par apostropher une femme dans l’assistance : “Ce rose vous va très bien. Je n’en tire aucune conclusion politique“. Et il est hilare, et autour de lui dans le cimetière, tout le monde ou presque se marre. Un des rares anciens résistants présents, profondément choqué, lui demande de faire cesser les rires. Il n’en a cure. Un autre ancien résistant lui offre un livre qu’il a écrit. Sarkozy le remercie puis aussitôt lui lance : “C’est bien, comme ça, je pourrai dire que j’ai un copain FTP“ ce qui à nouveau déclenche les rires de l’assistance. Puis encore au même : “Et vous direz : j’ai un copain président de la République. “ »

Voilà qui est réellement Nicolas Sarkozy. Alors, que ses copains du Gouvernement crient à l’outrage et à l’insulte et se scandalisent des propos qu’a tenus sur lui Martine Aubry en le comparant non sans humour à Bernard Madoff, est purement et simplement grotesque. Car s’il n’est pas Bernard Madoff, cet homme sans scrupules, n’est-il pas, bel et bien, un homme vulgaire et indélicat ?

Reynald Harlaut, Parti de Gauche

Sous le parrainage de Stéphane Hessel et de l’Association Citoyens Résistants d’hier et d’aujourd’hui. « Les Jours heureux ». Le programme du Conseil national de la Résistance de mars 1944 : Comment il a été écrit et mis en œuvre, et comment Sarkozy accélère sa démolition. Avec les contributions de Emmanuelle Heidsieck, Martine Orange, Jean-Luc Porquet, François Ruffin et Olivier Vallade.

Éditions La Découverte, 2010.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

l'anti Sarkozysme primaire a encore de beau jour.