16 décembre 2010

« C’est l’hôpital public qu’on assassine »

« C’est l’hôpital public qu’on assassine ». De qui est cette phrase ? D’un opposant de gauche au président de la République pense t-on d’abord. Eh bien non, vous avez perdu. Elle est de Bernard Debré, député de l’UMP, mais un révolutionnaire quand même selon la marquise Lagarde.

À la mi-octobre, alors que les salariés de ce pays étaient mobilisés dans la rue pour défendre la retraite à 60 ans, des mouvements de grève touchaient quarante quatre hôpitaux dans le silence ou l’indifférence relative des médias. La situation dans les hôpitaux publics tourne au cauchemar depuis la mise en œuvre de la loi HPST (hôpital, patients, santé, territoires) et son corollaire, les vingt-six agences régionales de santé (ARS).

C’est probablement cela qui a poussé Anne Gervais, médecin à l’hôpital Bichat et André Grimaldi, professeur de médecine à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à publier dans le Monde diplomatique de novembre 2010 un article intitulé : Hôpital public à vendre.

Voici un extrait de ce que déclarait le 8 novembre le professeur Grimaldi, interrogé à ce sujet par Daniel Mermet dans l’émission « Là-bas si j’y suis » qu’il consacre chaque mois au Monde diplomatique. Lisez bien et jugez-vous-même !

« J’ai, dit-il, rencontré Jean-Michel Laxalt, qui était jusqu’en 2009 président de la MGEN [Mutuelle générale de l’Éducation nationale], donc d’une grande mutuelle, vice-président de la Mutualité française, qui me rapportait son entrevue à l’Élysée avec le président Sarkozy. Et il me disait : « Quand on rencontre le président de la République avec la Mutualité française, en général on a droit à un discours assez convenu qui est : « Je suis heureux de recevoir un des piliers du pacte social républicain ». Avec lui, là, ça a été tout différent. Le président Sarkozy a dit une première phrase : « Vous êtes ici au Centre de décision nucléaire ». Deuxième phrase : « Je n’ai rien contre vous ». Troisième phrase : « Nous avons deux points à l’ordre du jour : la discussion du financement de la solidarité et un point technique ». Et, poursuivit Jean Laxalt, nous n’avons discuté que du point technique. Et le point technique lui demandais-je, c’était quoi ce point technique ? Le président de la République : « TOUT, désormais, est ouvert à la concurrence ».

On comprendra donc immédiatement que s’en est fini de notre système de protection sociale et de santé publique : de la Sécurité sociale, de l’hôpital public accessible à tous sans distinction de statut social et de revenus. Ce sera très certainement, même non déclaré, l’un des objectif fixés à ce « nouveau » gouvernement et ce n’est certes pas un hasard si les composantes dites « sociales » de l’ancien ont toutes été priées d’aller voir ailleurs. Ce à quoi nous allons désormais être soumis dans les mois à venir, c’est à de la chirurgie de guerre sans anesthésie. Car cette droite de choc, impitoyable, va bien sûr récidiver, enhardie d’être parvenue à faire passer – même aux forceps et en dépit du coût politique à payer –, la contre-réforme des retraites. Et cela d’autant plus rapidement que le temps lui est compté avant la présidentielle et que les forces vives de la nation ont, après cette bataille, besoin de reprendre souffle. Monsieur frère, patron du groupe Malakoff-Médéric, est quant à lui, déjà prêt à ramasser la mise.

Reynald Harlaut


Pour lire l’article d’Anne Gervais et André Grimaldi : « Hôpital public à vendre » :
Le Monde diplomatique N°680 – Novembre 2010, p. 1.
http://www.monde-diplomatique.fr/

Pour réécouter l’émission de Daniel Mermet du 8 novembre : « Autour du Diplo » :
http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=2033

Aucun commentaire: