8 février 2011

Les vacances de Madame Alliot…et de M. Ollier


Les prochains congés que prendra la ci-devant ministre Alliot-Marie (et son compagnon Ministre lui aussi) auront sans doute un point commun avec ses dernières en Tunisie. Elles pourraient bien ressembler à une traversée du désert.
Car depuis qu’ont été révélées par la presse les circonstances et le déroulement de ses dernières vacances tunisiennes, présumées aux frais du clan Ben Ali, alors que la révolution était déjà en marche, les déclarations de la ministre ne sont qu’une succession calamiteuse de faux-pas provoquant son enlisement irréversible dans les marécages du mensonge.

Michèle Alliot-Marie ment lorsqu’elle déclare qu’elle est partie pour la Tunisie avant la survenue des évènements qui ont mené à la révolution et au renversement du dictateur Ben Ali. Le jeune Mohamed Bouazizi de Sidi-Bouzid, s’était déjà immolé par le feu le 17 décembre, quand elle est partie pour passer le réveillon de Noël. Ministre des Affaires étrangères, renseignées par ses services, elle ne pouvait rien ignorer de la situation en Tunisie. Mais elle n’a pas voulu ajourner son séjour, elle et ses proches, prévu, on peut le supposer, depuis un certain temps, bien qu’il s’agirait selon elle – et c’est un mensonge de plus –, d’un déplacement inopiné.

Michèle Alliot-Marie ment quand elle affirme que c’est un heureux concours de circonstances qui l’a amené à emprunter un jet privé appartenant « à son vieil ami Aziz Miled » pour l’emmener, elle et les siens, de l’aéroport de Tunis jusqu’à celui de Tabarka. On sait depuis grâce au Nouvel Observateur que le luxueux appareil spécialement aménagé comme on a pu en voir les photos, lui a aussi permis de faire une escapade le 29 décembre, de Tabarka jusqu’à Tozeur, dans le Sud-Tunisien aux confins du désert. Cet avion avait donc été mis à sa disposition par le clan Ben Ali en la personne d’Aziz Miled, un homme d’affaires proche de l’ex président tunisien et copropriétaire de l’appareil avec le beau-frère du dictateur déchu.

Michèle Alliot-Marie ment quand elle déclare que Aziz Miled était un opposant au président Ben Ali alors qu’il gravitait jusqu’à peu dans le cercle des proches du pouvoir. Michelle Alliot-Marie se moque du monde quand elle déclare ne plus se souvenir qui d’elle ou de Patrick Ollier son compagnon a réglé la note d’hôtel à Tabarka. Le Canard Enchaîné recherche en vain depuis deux semaines les traces d’un quelconque règlement de leur part.

Il est donc permis de considérer à propos du déroulement de son séjour deux éléments. Le premier est que ces transports aériens de Tunis à Tabarka, puis de Tabarka à Tozeur et retour lui ont permis d’échapper à la traversée de régions du pays déjà en proie à de graves troubles. Le second est qu’on doit beaucoup s’affairer dans l’entourage de la ministre pour justifier à posteriori le règlement de la note de l’hôtel appartenant lui aussi aux milieux proches du pouvoir. Cela, compte tenu de la présomption que le séjour se soit initialement déroulé aux frais de ses hôtes tunisiens, ceux-là mêmes du clan Ben Ali. Ces pratiques consistant par un ministre de la République en exercice – même si elle séjournait à titre privé –, à en faire supporter toute ou partie des frais par des personnes proches du pouvoir d’une puissance étrangère, avérées lorsqu’il s’agit du transport par jet privé, ou présumées lorsqu’il s’agit du séjour lui-même, sont en totale contravention avec les règles élémentaires qui s’imposent aux représentants de l’État, qu’ils soient simples secrétaires d’ État, ministres, ou comme l’est Madame Alliot-Marie ministre d’État.

Michèle Alliot-Marie ment donc effrontément. Et le grotesque le dispute à l’odieux lorsque l’on se rappelle que peu de temps après son retour, le 12 janvier, devant l’Assemblée nationale, elle proposait au pouvoir de Ben Ali l’aide et le savoir-faire de la France pour maintenir l’ordre dans les rues des villes tunisiennes alors que le peuple se révoltait contre la dictature. Mais ce qu’on ne se lassera pas d’observer, c’est depuis le début le silence du président de la République qui n’a pas dit un mot pour soutenir la ministre en difficulté. Et c’est la délectation et le cynisme avec lesquels il la laisse, elle qui n’a jamais appartenu à son clan, mais dont il n’est jamais parvenu à se débarrasser en dépit de l’aversion que lui inspirent les Chiraquiens, s’empêtrer elle-même chaque jour davantage dans le piège de ses mensonges, telle la mouche prise dans la toile de l’araignée.

Privée de désert, deux solutions ne s’offrent plus qu’à elle pour ses prochaines vacances : soit se rendre à la mer de sable d’Ermenonville, soit escalader la dune du Pyla à Arcachon. Et qu’importe alors à Patrick Ollier s’il ne dispose pas pour cela de dromadaire !

Reynald Harlaut
Sources : Le Monde, Libération, Le Canard Enchaîné, le Nouvel Observateur, Rue89,

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