30 novembre 2011

« La 27e campagne des Restos du cœur ou l'accompagnement de la misère »

« C’est l’ouverture de la 27e campagne d’hiver des Restos du Cœur, magnifique ! C’est une entreprise
en plein essor qui fait mieux d’années en années, qui pulvérise tous ses records, à ce rythme elle
finira cotée en bourse. Mais en réalité, bien loin d’être un succès c’est une véritable catastrophe !
Cela veut dire que la pauvreté progresse à grand pas et que le nombre d’exclus est en constante
augmentation.

 Les restos du cœur sont devenus une véritable institution, et le concert annuel devient pour les
artistes et les chanteurs un passage obligé. Il offre aux vedettes nanties l’occasion d’être associées
à une belle image compassionnelle et améliore l’image de ceux qui y participent. Certains artistes
que l’on connaît pour leur vote bien à droite, ou qui se barrent à l’étranger pour ne pas payer
d’impôts, viennent y prôner la charité plutôt que l’égalité. C’est une espèce de club où l’on rentre par
cooptation, réunissant des gens qui sont là d’abord pour se montrer, éventuellement pour passer
(photo DR)
du bon temps ensemble, se faire de la pub et accessoirement ramener de l’argent aux restos. Mais
là, tout le monde ne participe pas de la même manière, il y a ceux qui jouent le jeu c’est à dire qu’ils
redonnent aux restos leurs droits d’auteur et le bénéfice qu’il leur revient sur les ventes des albums,
ceux qui reversent leur part sur les ventes, mais ne cèdent pas un euro sur leur droits d’auteur et
ceux qui carrément ne redonnent rien.
Chacun se donne bonne conscience en participant à ces grands shows médiatiques, et passe sous
silence le pourquoi de la situation. La compassion est une vertu capitaliste, la pitié est habilement
mise en scène et évite toute réflexion politique. La charité ne fait qu’entériner l’existence de
la souffrance et renonce à en corriger la cause. Il est plus facile de mobiliser l’émotion que
remettre en cause une politique. Au contraire cela sert souvent à la justifier. On exploite la
sensibilité du citoyen afin que les sentiments remplacent la raison.
Combien de pauvres, combien d’exclus qui bénéficient de charité ou qui vont manger aux
restos du cœur, ne vont pas voter, ou pire, votent pour ceux qui les ont plongés dans la misère. C’est
pourquoi distribuer de l’aide sans expliquer aux individus les raisons de leur situation ne sert pas à
grand-chose sur le fond. Pire, cela conforte le système, car ils pensent que c’est grâce au système
qu’ils reçoivent de l’aide.
Toutes les associations qui aident les pauvres et les laissés pour compte feraient bien de
revendiquer l’abolition de la misère, plutôt que de l’accompagner. Maintenir les pauvres dans
leur sort par une charité institutionnalisée via le RSA, le RMI ou les diverses aides sociales, permet
de passer sous silence les véritables flots d’argent que l’on distribue aux plus riches : le paquet fiscal
et les remboursements d’impôts n’en sont qu’une partie ! Et ce sont les contribuables qui payent
l’addition !
La redistribution ne doit pas se faire sous forme de charité spectacle ou charité business, la
redistribution doit se faire par un partage équitable des richesses. De l’argent il y en a, il y en a même
beaucoup, et en allant le prendre là où il se trouve on pourra sans difficulté subvenir aux besoins de
l’ensemble de la population. Ce n’est pas un choix économique, c’est seulement un choix politique ! »
Alain Lefeez

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