18 février 2012

Qui est vraiment Martin Hirsch ? Par Reynald Harlaut


Ancien président d’Emmaüs France, Martin Hirsch, ancien Haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté dans le gouvernement de François Fillon, apparaît encore aujourd’hui comme une personnalité jouissant d’un crédit indiscutable dans l’opinion. C’est du moins ce que nous pensions de lui pour l’avoir encore entendu récemment porter la bonne parole à la radio.

Même si sa proximité avec la majorité au pouvoir n’a pas manqué d’interpeller un certain nombre de gens de gauche dont nous sommes.
Pourtant, nous avons manqué de vigilance. Sa nomination le 14 mai 2010 à la tête de l’Agence du service civique, organisme dépendant de l’État créé seulement deux jours auparavant, avec la modeste rémunération d’environ 9.200 € par mois, avait de quoi laisser songeur. Il n’a jamais démenti, à notre connaissance, qu’il s’abstenait de la percevoir. Du sur mesure… taillé aux frais du contribuable. Du sarkozysme pur sucre. Cela aurait dû nous ouvrir les yeux. À moins qu’avec le temps, nous ayons oublié.
Or, au détour d’une information révélée par Marc Laimé (1) sur un potentiel conflit d’intérêts s’étant fait jour au sein de la commission des aides à l’Agence de l’eau Seine-Normandie, qu’apprend-on ? On découvre que M. Martin Hirsch, jusqu’à présent considéré comme une haute autorité morale, sensible aux conflits d’intérêts, n’est guère disponible ces temps-ci pour s’occuper de ce genre de problème. C’est qu’il participe depuis le début de cette année à une caravane publicitaire du groupe Suez-Lyonnaise des Eaux qui sillonne la France afin d’aller porter la bonne parole aux élus en matière de « nouveaux contrats », et se faire en quelque sorte par la même occasion le garant de « la transparence et l’éthique » du groupe. Excusez du peu ! M. Hirsch aurait-t-il avant cela démissionné de l’Agence du service civique ? Rien n’est moins sûr ! Ou bien le site Internet officiel de cette agence ne serait-il pas régulièrement mis à jour ?

(photo JCH
Tout laisse à supposer cependant que M. Martin Hirsch n’accomplit pas ce pèlerinage aux sources et à travers la France pour prêcher la bonne parole, comme un sacerdoce, sous le sceau du bénévolat, pour le compte d’un groupe privé tel que celui-là. Selon l’expression consacrée, « Faudrait pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards sauvages ! »
Y a-t-il donc encore à ce jour dans notre beau pays des gens à qui l’on puisse faire vraiment confiance ? Là est toute la question. Mais force est de constater que, pour le retour de l’eau en régie publique, face à ces multinationales que sont Véolia, Suez-Lyonnaise des Eaux et SAUR, les trois principales, la tâche est immense. Quand on découvre les procédés qu’elles utilisent pour manipuler les clients acquis ou à conquérir en achetant la notoriété, l’exemple moral, le talent, l’entregent de personnalités (2) venant de tous milieux : scientifique, éducatif, artistique, associatif, politique, etc., en institutionnalisant de la sorte la corruption, on se dit qu’elles n’ont rien appris des derniers scandales dont elles étaient responsables. Que les fameux PPP (partenariats public-privé) sont à revoir entièrement sinon à proscrire. Qu’enfin le combat est de tous les instants et qu’il ne faut surtout rien lâcher.


Reynald Harlaut

      (1)   Marc Laimé est journaliste, spécialiste de la question de l’eau.


(2) Dans le film document « Crise, krach et gueule de bois » diffusé en janvier 2011 sur France 2, Érik Orsenna déclare, à propos des raisons d’espérer en l’avenir : « … Il faut changer les menaces en opportunités. Je voyage énormément. J’ai fait un livre sur l’eau. Et je me rends compte que l’eau sera un des problèmes principaux que va rencontrer la planète. Et comme par hasard, les deux plus importantes, les plus efficaces sociétés au monde dans le domaine de l’eau et de l’assainissement sont des sociétés françaises ». Sans commentaire !


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