20 avril 2016

Le sacre du printemps à Val-de-Reuil, le massacre de LVMH à Louviers

(photo compagnie Dominique Brun)

Un choix cornélien. Rester à Louviers pour visionner « Merci patron » au cinéma Forum avec la présence espérée de François Ruffin (1) ou aller à l’Arsenal de Val-de-Reuil y apprécier « Le sacre du printemps » chorégraphié par Dominique Brun. J’ai fait le choix du cœur et non celui de la raison. Autant un film documentaire peut être vu à la demande, autant un spectacle vivant ne dure qu’un instant et nécessite une présence physique, attentive, passionnée…

Il est étrange qu’au moment même où Marc-Antoine Jamet se faisait conchier par des adversaires (et aussi des ennemis politiques) pour son rôle équivoque dans un arrangement au service de LVMH filmé à son insu, un autre spectacle était donné dans un théâtre voulu, justement, par le même MAJ, maire de la ville et ambitieux au service d’une collectivité en progrès.

Ce que je sais de l’auditoire de Louviers est qu’il y avait foule. Une foule composée de membres de la gauche de la gauche, de socialistes anti-Jamet, d’élus de l’opposition rolivaloise et aussi d’authentiques militants mélenchonistes supporteurs de François Ruffin et du mouvement « la nuit debout ». On ne saurait reprocher à tous ces activistes et militants un engagement nécessaire quand le gouvernement nous offre un spectacle aussi navrant. François Ruffin pourra bientôt piéger ces députés socialistes, pourfendeurs de Jamet, mais suivistes de Valls et El Khomri et sa loi Travail si favorable au patronat. Merci qui ?

Revenons à la danse et à l’Arsenal puisque c’est en ce lieu culturel de haut niveau que s’est donné le ballet de Nijinski, Stravinsky revu et corrigé par Dominique Brun et devant un très nombreux public comprenant nombre de jeunes. Un public désemparé, sans voix, ayant eu du mal à « adhérer » comme on dit. Surtout dans la première partie où les corps sont devenus ceux de primates gauches, aux membres désaxés et aux torses pliés courant après on ne sait quel monde imaginaire. Nijinski voulait cela et la chorégraphe contemporaine s’est donc inspirée des dessins de Valentine Gross Hugo, seuls témoignages du travail du grand artiste russe.

La seconde partie, sacrificielle, plus abordable, moins essoufflée, moins inquiétante alors que l’héroïne pourtant perd la vie, a suscité des applaudissements de soulagement. Ceux adressés à François Ruffin étaient sans doute plus spontanés et moins réfléchis. Toute la différence, en somme, entre l’art et la militance. Cette dernière n’empêchant ni l’humour, ni le questionnement sur le fonctionnement de notre société.

(1) François Ruffin, prétextant un agenda fourni, a fait faux bond aux Lovériens. Son absence n’a donc pas permis la tenue d’un débat pourtant promis au public.

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