6 septembre 2016

Les décodeurs devraient contraindre les politiques à moins tordre le cou à la vérité


Des quotidiens d’information comme Le Monde et Libération ont créé au sein de leurs rédactions des équipes chargées de contrôler les affirmations des hommes et des femmes politiques. Pendant des années, les vedettes médiatiques telles que Nicolas Sarkozy ou Jean-Marie Le Pen ont sans cesse asséné des arguments, des chiffres, des statistiques présentés comme autant de vérités définitives alors qu’un peu d’investigation aurait mis à mal ces affirmations. La plupart du temps, ces « ténors » de la télévision font peu de cas de la vérité des faits obsédés qu’ils sont par leur course à la notoriété et à la « petite phrase ».

Les décodeurs, donc, puisque tel est leur nom, vérifient aujourd’hui systématiquement les déclarations des candidats aux primaires de gauche, de droite, du centre, du FN, des Verts ou celles des membres du gouvernement. Ils sont conduits à analyser chaque phrase, chaque assertion de ceux et celles qui ont vocation à représenter le peuple et donc à lui dire la vérité. C’est évidemment très théorique dans la mesure où les généralités, la langue de bois et les faux semblants composent le plus souvent le menu quotidien des candidats. Les Mendès France ne sont pas pléthore.

Deux exemples suffisent à illustrer la nécessité de ce travail de contrôle et d’investigation. Le procureur de la république, au vu du dossier établi par les trois juges d’instruction de l’affaire Bygmalion, affaire du dépassement du plafond des comptes de campagne de Sarkozy en 2012, propose le renvoi en correctionnelle de l’ensemble des protagonistes dont l’ancien président de la République alors candidat. Me Herzog, avocat de Nicolas Sarkozy, a émis quelques remarques considérées comme «douteuses» par les décodeurs du journal Le Monde. Considérant ces remarques une par une, ces derniers démontrent, preuves à l’appui, que l’avocat prend des aises avec la vérité des faits et expliquent « pourquoi c’est faux ». Me Herzog est ainsi ridiculisé et le citoyen Sarkozy confondu.

Idem avec une mise au point de Manuel Valls. Les mêmes décodeurs ont enquêté pour savoir si la contestation (par le premier ministre) d’un article du New York Times était justifiée ou non. Elle ne l’est pas. M. Valls a pris bien des libertés avec la vérité et ce n’est pas à son honneur surtout quand il s’agit de répondre à un article de presse. Dans ces cas là, l’expérience prouve que les contradicteurs des journalistes ont intérêt à vérifier plutôt deux fois qu’une la teneur de leurs réponses. Visiblement Manuel Valls a tiré plus vite que son ombre mais ce n’est pas la première fois.

On le voit, les politiques ou leur entourage (1) pratiquent l’art de l’enfumage avec une facilité déconcertante. L’existence des réseaux sociaux, la mémorisation aisée de leurs anciennes « vérités » comparées à celles d’aujourd’hui, devraient contraindre les discoureurs  à plus de précautions et plus de respect pour les citoyens que nous sommes. Nous disposons, avec une presse indépendante, d’outils nouveaux et incontestables. Fini de dire n’importe quoi pour gagner des voix.

(1) Les juges d’instruction disposent d’un délai d’un mois pour prendre leur décision : non lieu ou renvoi devant le tribunal correctionnel. Voilà pourquoi les Ciotti et consorts mettent la pression sur ces juges pourtant indépendants.

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