16 décembre 2016

Madona et Pierre Corneille ont des ancêtres dans l'Eure : et vous ?


Jean-Pierre Raux en action. (photo JCH)
Madona et ses ancêtres originaires de la région du Neubourg. Mitterrand cousin éloigné (très) de Giscard d’Estaing. Radiguet, Corneille, Duruflé etc. tous liés à notre département…la généalogie permet les associations les plus improbables. Et quand un grand chef de la pratique de cette passion explique comment conduire des recherches personnelles sur les origines de chacun, quel plaisir de l’écouter.

Invité par l’Université populaire de Louviers, ce jeudi, Jean-Pierre Raux, le président du Cercle des généalogistes de l’Eure, ne s’est pas contenté d’expliquer pourquoi il faut conserver les images de communion, les photos de baptêmes ou de mariage, lire avec attention les épitaphes des monuments funéraires, et pourquoi la généalogie fait appel à des qualités spécifiques : la patience par exemple et le plaisir d’apprendre. Il est parvenu, avec une décontraction apparente et un solide sens de l’humour, à communiquer cette envie de connaître ses ancêtres mais également de s’intéresser à leur vie.

Les dates de naissances, les appariements, l’arbre généalogique ne lui suffisent pas. Il propose de s’intéresser aux contextes historique et géographique, aux métiers pratiqués, aux positions sociales des uns et des autres sachant qu’il y a peu encore, la plupart de nos ancêtres étaient liés à la terre et à sa culture. Jean-Pierre Raux propose quelques pistes simples pour débuter en généalogie et vante Internet (1) lequel ne remplacera jamais les recherches dans les mairies, les Archives départementales, enfin  et surtout, la consultation des archives familiales dont on ne mesure pas toujours le vif intérêt qu’elle suscite quand on sait les lire. Sans oublier les registres paroissiaux pour toutes les recherches antérieures à 1792 date de naissance de l’état-civil républicain.

Cette conférence de vulgarisation suscitera sans doute quelques vocations. Personnellement, je ne regarderai plus de la même façon les photos de mes grands-parents ou les cartes postales que j’ai amassées au fil du temps. Je prendrai dorénavant le temps de lire les menus des quelques mariages auxquels j’ai été invités et vais, de ce pas, tenter de retrouver le livret militaire de mon père dont j’ignorais qu’il contînt tant de trésors…

(1) Il existe évidemment de nombreux sites liés à la généalogie. Jean-Pierre Raux en a cité quelques-uns tels que « mémoire des hommes » ou « geneanet ». Je vous conseille de trier le bon grain de l’ivraie et de préférer les sites gratuits.

15 décembre 2016

François Ruffin n'aime pas qu'on critique le referendum. Il a tort.


Le général de Gaulle en Irlande après la défaite de 1969…
En entendant François Ruffin affirmer dernièrement dans l’émission 28 minutes sur Arte, que ceux qui  critiquent les résultats des referendums visent, ni plus ni moins, qu’à remettre en cause la validité du suffrage universel et qu’en le contestant c’est faire preuve d’une arrogance antidémocratique, j’ai explosé intérieurement. Lui, François Ruffin, considère que les referendums sont l’expression légitime des colères du peuple et que ce processus électoral ne mérite pas tant d’opprobre. D’ailleurs ne vient-il pas d’affirmer qu’au « populisme de droite, il fallait opposer le populisme de gauche. » Merci beaucoup mais le théâtre politique est déjà rempli de ces histrions fanatiques ivres de ce que d’aucuns appellent l’ère post-vérité. La vérité des faits et des événements ne vaut plus rien. Ce qui compte, c’est la rumeur. Vive Trump, Vive Farage, Vive Grillo, Vive Poutine, Vive Le Pen ! Vive Ruffin !

Le referendum est-il l’outil démocratique absolu tel que vanté, notamment, par tous ces populistes de droite et de gauche ? Sur le papier, c’est vrai, le referendum peut apparaître comme la forme la plus aboutie de l’expression populaire. Le général De Gaulle a même souhaité en faire un outil de gouvernance. Il en a été lui-même victime en 1969 lors de ce fameux referendum sur la régionalisation perdu comme chacun sait par l’homme de la France libre. Il s’agissait d’une autre époque, sans doute, pourtant les Français répondaient déjà, non pas à la question, mais à celui qui la posaient. Si c’était à refaire, j’en connais qui modifieraient leur vote de l’époque puisque dans le texte du général le Sénat devait disparaître et que personne, depuis, n’a osé revenir sur sa suppression au fond pas si contestable que cela.

Dans un référendum, si la question peut s’avérer complexe, la réponse est très simple : c’est oui ou c’est non. C’est blanc ou c’est noir. Dans une démocratie présidentialo-parlementaire, le referendum met en prise directe le chef de l’Etat et le peuple, court-circuitant, de fait, les corps intermédiaires que sont les parlementaires, les partis politiques, les associations. Posons nous donc la question de savoir pourquoi les Le Pen et autres Wilders (aux Pays-Bas) réclament à cors et à cris un referendum pour exiger la sortie de l’Europe ? Parce qu’ils pensent éviter le lent et patient travail d’explications permettant d’informer le peuple mais surtout parce qu’ils sont convaincus (exemples le Brexit et le referendum italien) qu’il est plus facile de mentir et donc de tromper les électeurs(trices). Le referendum est devenu un moyen d’efficacité pour un discours simpliste « qui parle aux tripes » comme le dit si bien Beppe Grillo. Les tenants du Brexit ont menti et c’est grâce à leurs arguments fallacieux qu’ils ont gagné. Quant à l’élection de Trump, s’il ne s’agissait pas d’un référendum, on ne peut pas dire que la vérité y ait trouvé son compte.

François Ruffin que j’ai connu plus avisé, devrait réfléchir à cette évidence. Avec le referendum, les bonimenteurs et les menteurs peuvent plus aisément tromper les peuples. Voilà pourquoi il convient d’être circonspect à l’égard de cet outil qui a toutes les apparences de la démocratie sans avoir très peu de ses avantages : quand la démocratie parlementaire prend le temps des consultations, le referendum est brutal, pervers, rapide et surtout définitif. Au Parlement, une loi peut être modifiée voire supprimée…pour remettre en cause un référendum, il faut en organiser un autre. C’est forcément plus compliqué.

13 décembre 2016

Ciné-concert vendredi 16 décembre 2016 à 19h30 au Théâtre du Moulin d’Andé


Ciné-concert Vendredi 16 décembre 2016 à 19h30,au Théâtre du Moulin d’Andé. Ballade improvisée de courts métrages amateurs issus des collections de la Mémoire Audiovisuelle du Pôle Image, accompagnée au piano par Alain Kremski et Francis Vidil.
Entrée libre suivi d’un repas partagé (apporter son pique-nique).

Pour cette 4ème édition de collaboration entre le Moulin d’Andé et le Pôle Image pour la fête du court métrage, le pianiste Alain Kremski a désiré improviser cette année à deux pianos, avec la participation de Francis Vidil, autour de films amateurs réalisés entre 1930 et 1965 par R. Dasché, F. Bignon, A. Bellefontaine, Y. Le Roy, H. Sergent et J. Martin-Pigeon.
Une plongée dans un fonds d’archives audiovisuelles de plus en plus riche axés ici sur des thématiques de jeux d’enfants, de fête de Noël, de loisirs en Seine ou de voyage maritime (dont le fameux Voyage Inaugural du paquebot France), une vision inédite du court métrage tournée avec bonheur et poésie par des cinéastes amateurs souvent éclairés. Présentation : Agnès Deleforge
Remerciements : F. Closier, Famille Bignon, M. Bellefontaine, Famille Le Roy, Famille Sergent, M. Belot, B. Martin-Pigeon.
Durée totale : 45 minutes
Les films sont consultables dans leur intégralité sur le site archivesenligne.fr via la rubrique « base documentaire »
Alain Kremski - Grand prix de Rome de composition, pensionnaire de la Villa Médicis, Grand prix de la Sacem en 2013 pour l'ensemble de son
oeuvre - est compositeur, pianiste et percussionniste. Il aborde des répertoires inhabituels : musiques sacrées de G. Gurdjieff, Friedrich
Nietzsche, Grieg, Dvorak, Alkan, des transcriptions de Borodine, Wagner, Mahler, de jeunes contemporains. http://www.kremski.fr/
Francis Vidil - Qualifié de charismatique troubadour, jouant de la trompette de la main gauche et du piano de la main droite, il enrichit aussi
bien la marche funèbre de Chopin de motifs arabes que les claviers des grandes orgues de sonorités jazziques…
https://francisvidildotcom.wordpress.com/

11 décembre 2016

« Donner du pain aux travailleurs, du travail à la jeunesse, et au monde la grande paix humaine. » Tel était le programme du Front populaire


Erçic Lafon. (photo Jean-Charles Houel)
« Que reste-t-il de nos amours ? » ou plutôt « Que reste-t-il du Front populaire ? » La plupart des personnes interrogées répondront : « Les congés payés et la semaine de 40 heures. » L’image du tandem (voir photo ci-dessous) circulant sur le remblai bordant la plage des Sables d’Olonne ajoute à la légende d’une période faste pour les droits des salariés. Le 80e anniversaire du Front populaire n’a pas été fêté comme on aurait pu s'attendre qu’il le fût de la part d’un gouvernement de gauche. Avec mai 68, l’arrivée au pouvoir de Léon Blum représente, pourtant, dans l’imaginaire collectif, un moment de progrès et d’avancées sociales considérables. Peut-être Mme El Khomri, la ministre du Travail, de la Formation et de l’Emploi, se sent-elle coupable d’une forme d’abandon des catégories de population qu’elle est censée défendre ?

Eric Lafon, directeur scientifique du musée de l’histoire vivante de Montreuil, invité ce samedi par la Société d’études diverses de Louviers à répondre à la question devant une salle à l’écoute, reconnaît que les légendes et les mythes concernant cette période ont la vie dure. Il a donc pris le temps de détailler, en historien (1) la genèse de la constitution du gouvernement présidé par Léon Blum, composé de ministres de la SFIO et du parti radical socialiste soutenu par les communistes… Les partis de gauche se sont rassemblés après les événements du 6 févier 1934 organisés par les ligues factieuses d’extrême-droite qui voulaient, dit-on, renverser le gouvernement Daladier.

Les années 1934 et 1935 auront été mises à profit par la gauche française pour élaborer une plateforme commune susceptible de les conduire au pouvoir et de favoriser un projet dit de gauche. Eric Lafon insiste sur un point : quand les élections législatives de 1936 ont lieu, la SFIO et le PCF n’ont pas la majorité au Palais Bourdon, pour gouverner il leur faut le soutien des radicaux-socialistes forcément plus modérés. Ce soutien aura évidemment des conséquences sur le contenu de l’accord puisqu’il ne s’agit pas, selon le mot de Blum, « d’une majorité prolétarienne. » Léon Blum et ses ministres (socialistes et radicaux) travailleront bien : congés payés, 40 heures, accords de Matignon avec augmentation des salaires, conventions collectives, auberge de la jeunesse, soutien direct aux républicains engagés dans la guerre d’Espagne pendant quelques mois…sans oublier le fameux mot de Maurice Thorez « il faut savoir terminer une grève…dès lors que les principales revendications sont satisfaites. » En mai et juin 1936, de nombreux travailleurs(euses) sont en effet en grève. Ils dansent, ils chantent, font preuve de fraternité et d’exigence de dignité car ils veulent, enfin, être reconnus dans la fabrique de l’histoire. Le patronat va lâcher sur les salaires et le temps de travail tout en espérant rebattre les cartes un peu plus tard…

la conférence fut abondamment illustrée.
Avec le temps, raconte Eric Lafon, les réussites et les échecs du Front populaire seront analysées plus objectivement eu égard aux recherches entreprises sur la base des archives publiques et privées. Elles éclaireront aussi bien la volonté de changement des gouvernants avec Jean Zay, Roger Salengro, Vincent Auriol, Pierre Cot (dont le rôle fut majeur pour venir en aide aux républicains espagnols) Camille Chautemps et la présence de trois femmes (2) que l’action bâtie sur le triptyque « le pain, la paix, la liberté ». Eric Lafon assure que le trait d’union des partis de gauche c’est d’abord et avant tout la lutte antifasciste. En Italie et en Allemagne, Mussolini et Hitler ont pris le pouvoir et ne cachent nullement qu’ils souhaitent faire la guerre aux démocraties. Mais la fin de l’expérience est proche. En 1938, Léon Blum propose modifier la politique financière de la France et se heurte à l’opposition du Sénat. Cette dernière entraîne sa démission et l’arrivée de Daladier au pouvoir. Exit le Front populaire. L’épopée commence. De même que les 7 mois et quelques jours…du gouvernement Mendès France ont marqué l’histoire de la gauche et affirmé sa crédibilité à gérer les affaires du pays, le Front populaire a joué un rôle considérable dans la capacité d’un gouvernement de gauche à contribuer au progrès social. Le contexte international, très défavorable, n’a pas empêché Léon Blum et ses ministres emblématiques de faire d’invention. La mémoire collective et les mémoires individuelles, en France et ailleurs, éprouvent encore une nostalgie certaine à l’évocation des noms de Salengro (poussé au suicide) Jean Zay (assassiné par la milice) et bien sûr Léon Blum homme d’état supérieurement intelligent et véritable animateur du Front populaire.
 
Haut du formulaire
Bas du formulaire(1) Une exposition itinérante : 1936, nouvelles images, nouveaux regards sur le Front populaire se tient actuellement au Musée de l’histoire vivante de Montreuil.Les auteurs/commissaires de l’exposition sont : Éric Lafon, directeur scientifique au musée de l’Histoire vivante, Frédéric Cépède (journaliste à l’Office universitaire de recherche socialiste), Jean Vigreux (professeur d’histoire contemporaine à l’Université Bourgogne). 
(2) Dans le gouvernement de Front populaire de Léon Blum, trois femmes ont été nommées ministres (ou « sous-secrétaires d'État ») alors qu'elles n'étaient, comme toutes les femmes de leur temps, ni électrices ni éligibles. Il s’agit de Cécile Brunschvicg, sous-secrétaire d'État à l'Éducation nationale, Irène Joliot-Curie, sous-secrétaire d'État à la Recherche scientifique, d'ailleurs démissionnaire dès le 28 septembre 1936, et Suzanne Lacore, sous-secrétaire d'État à la protection de l'enfance.