22 février 2017

Choquant et injuste : le nouveau délai de prescription pour abus de bien social voté par le Parlement


Les parlementaires n’ont pas conscience des ravages que cause l’approbation de certains textes même lors d’un quinquennat finissant. Le dernier exemple en date illustre l’écart séparant les députés et sénateurs des citoyens dont l’une des principales revendications est l’égalité de traitement devant la loi.

Ainsi, une proposition de loi sur la prescription pénale, adoptée définitivement le 16 février par le Parlement, vient d'entériner une mesure qui pourrait potentiellement permettre aux auteurs d'abus de biens sociaux, de prise illégale d'intérêts ou encore de fraude fiscale d'échapper plus facilement à des poursuites lorsque les faits sont anciens.

Si, dans les cas "classiques" les délais ont été doublés, de 3 à 6 ans pour les délits et de 10 à 20 ans pour les crimes, un amendement du gouvernement est venu assouplir le délai de prescription pour certaines infractions "astucieuses". Pour ces dernières infractions, la jurisprudence avait acté le report du point de départ du délai de prescription au moment où elles ont été découvertes (et non au moment où les faits ont été commis). En clair, pour un délit entrant dans cette catégorie, la prescription de 3 ans ne démarrait qu'à partir du moment où les faits étaient mis au jour.

Des remarques de la Cour de Cassation ont conduit les parlementaires à porter à 12 ans le délai de prescription des délits en col blanc mais avec un bémol majeur : ce délai court dorénavant de la date de la commission des faits et non pas de la date de leur découverte. S’agissant de l’affaire Fillon, par exemple, les faits commis avant 2005 (2017 moins douze ans) seraient prescrits si la nouvelle loi avait eu cours puisque les évènements relatés par le Canard enchaîné ont été révélés cette année. A l’évidence, cette constatation est plus que choquante voire injuste. Qui protège qui ?

Interrogés par France Inter, hier à l’Assemblée nationale dans « le moment Meurice », Georges Fenech, ancien magistrat, député LR, s’en est tenu au texte nouveau sans vouloir le commenter malgré les relances du journaliste. Quant à François Loncle, député de Louviers, lui aussi interrogé, il s’est emmêlé les pinceaux ne sachant plus très bien (1) s’il avait ou non approuvé le texte, un texte contre lequel il voterait lors d’une nouvelle lecture sauf que la loi a été adoptée définitivement pour éviter les navettes avec le Sénat….
(1) Il a déclaré être spécialiste des affaires étrangères pas des travaux de la commission des lois.

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